lundi 29 avril 2013

L'homoparentalité est-elle porteuse d'un risque affectif
Par Maurice Berger, chef de service en psychiatrie de l'enfant
 
La plupart des études affirmant que les enfants élevés par des couples homosexuel(le)s vont bien présentent des biais importants. Et une lecture approfondie et prudente de Mark Regnerus en 2012, portant sur 3 000 adultes, montre que l'absence de différence de développement entre un sujet ayant eu des parents homosexuels ou non est un dogme qui ne tient pas, les personnes allant le mieux étant celles élevées par un père et une mère.
Comme dans les autres disciplines médicales, il est donc indispensable qu'une commission d'experts pédopsychiatres fasse une analyse critique de ces études avant toute prise de décision. Pour le clinicien psychiatre d'enfants (athée et favorable au pacs) que je suis, la question peut être abordée différemment.
De l'amour, un enfant peut en recevoir d'un couple homoparental qui l'élève, mais quand on l'écoute, voici les risques qui menacent son développement.
 
DIFFÉRENTS ET COMPLÉMENTAIRES
Tout d'abord, un enfant a besoin de pouvoir s'identifier aux composantes masculines et féminines de ses parents. De nombreux travaux montrent que père et mère offrent au bébé un style d'échanges différents et complémentaires. Schématiquement, les mères proposent un dialogue émotionnel.
Par la voix, le regard, la recherche d'une position confortable, elles font naître chez lui les sentiments originels de sécurité et régulent ses états de bien-être et de mal-être. Les pères sont dans un échange plus physique, plus stimulant (comme le fait de soulever le bébé dans les airs), demandent plus la réalisation de tâches, mettent plus au défi.
L'enfant a besoin de cette asymétrie parentale, et c'est un leurre de dire que, élevé par des adultes homosexuels, il va pouvoir s'identifier à la dimension masculine ou féminine qui lui manque à l'occasion de contacts avec des amis adultes d'un sexe différent de celui de ses parents.
Ensuite, tout enfant qui bute sur le mystère de sa conception ressent une excitation perturbante face à cette énigme. Tous ont une curiosité concernant leur origine, sous la forme de questions telles que " Où poussent les enfants : dans l'estomac ? Par où naissent-ils : par le derrière, par le nombril ? Comment les fait-on ?"
Tant que l'enfant n'a pas trouvé de réponse satisfaisante, son esprit reste agité, excité par ces questions, sa curiosité sexuelle est suractivée. Ainsi, une fillette excitée en permanence et élevée par un couple d'homosexuelles dessine en psychothérapie une reine entourée de huit enfants "qui ont été faits par la soeur de la reine, magicienne qui a concocté une potion". La reine n'a ainsi pas eu besoin d'hommes pour concevoir des enfants.
C'est une mystification d'affirmer que l'explication donnée à l'enfant sur les processus techniques à l'origine de sa conception va suffire à gommer magiquement les questions qu'il se pose sur l'impossibilité structurelle de sa conception par le couple.
Mais ce questionnement, il ne le montre qu'en psychothérapie et pas au couple homoparental, présentant ainsi un "syndrome de l'enfant parfait".
 
SCÈNE FONDATRICE DE SON EXISTENCE
A l'opposé, les images qu'un enfant de couple hétérosexuel a de la sexualité de ses parents sont tempérées, apaisées par le fait qu'ils sont des amoureux pas comme les autres : leur sexualité ne sert pas uniquement à leur plaisir, mais aussi à faire des enfants. C'est grâce à elle qu'il a été conçu.
Il peut penser qu'il est né d'un double désir, désir de chaque parent pour l'autre, désir commun d'avoir un enfant. Le couple parental hétérosexuel, même divorcé, est donc ce qu'on a trouvé de mieux pour que sexualité, conception et tendresse parentale soient indissociablement liées.
Et comment une fillette peut-elle comprendre que deux hommes qui ne veulent pas avoir de femme puissent avoir désiré une fille ?
Par ailleurs, tout enfant a besoin de pouvoir se représenter une origine crédible, une scène fondatrice de son existence, avoir la notion d'un désir fondateur de sa vie. Cette scène est présente même lorsqu'un enfant est issu d'une procédure de procréation médicalement assistée (PMA) dans un couple hétérosexuel, parce que c'est une stérilité d'origine médicale, et non un choix de vie sexuelle, qui empêche le projet de conception hétérosexuelle.
Enfin, on sait que la construction de la filiation par des enfants adoptés est un processus complexe qui échoue dans un nombre non négligeable de cas. On constate que, même élevés par des parents très adéquats, les enfants adoptés se questionnent souvent d'une manière interminable sur les raisons de leur abandon par leurs parents biologiques, car l'adoption a toujours été précédée d'une sorte de tragédie, selon l'expression de Caillot, qui est l'abandon.
Ils ne supportent pas l'idée d'une faille chez leurs géniteurs. Aussi se demandent-ils s'ils ont été volés sur un marché, si leurs parents étaient trop pauvres pour les nourrir, si leur mère a-t-elle été violée, raison pour laquelle elle ne voulait pas d'eux...
Rajouter à cela la difficulté de comprendre une filiation homoparentale, c'est leur rendre la tâche encore plus ardue, les condamner à une double peine.
 
Maurice Berger, chef de service en psychiatrie de l'enfant au CHU de Saint-Etienne.

 

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